Un automne qui annonce les beaux jours d’ El Djazaïr

Il suffit Erwan, tes mauvaises manières passent encore quand nous sommes entre nous mais il serait de bon ton de ne pas exagérer. Si le cachot ne suffit pas je trouverai bien la punition appropriée. Que dirais-tu d'être affecté au transport de fret et munitions jusqu'à la fin de la guerre? Naviguer assis sur une bombe et risquant à tout moment de se faire allumer par le premier venu, sans avoir autre possibilité que la fuite... Je suis sûr que ça te plaira!

Erwan n'avait que l'envie de renoyer son chef sur les roses mais l'image furtive de sa personne à la barre d'un cargo en flamme entouré de U-boat lui permit, pour une fois, de retenir sa lange.

Puis Muselier fit part des travaux entrepris à Dakar et avant même qu'il puisse lui répondre Paul faisait déjà sentir son désaccord. Lorsqu'il eut terminé se fut au tour de Daucourt.

Amiral le fait que Dakar soit en travaux pour agrandissement est déjà un bon point c'est sûr. Mais je suis malgré tout en accord avec le commandant Doria, les instalations n'y seront que très peu utilisées et la zone de conflit majeure en ce qui nous concerne se trouve ici-même en méditerrannée.

Mais j'ose espérer que Dakar n'est qu'une étape dans un projet plus vaste qui vise à faire croître nos moyens dans d'importantes proportions.

Et enfin j'ajouterai que le projet du Cuirassé classe Algérie ne peut être entrepris qu'ici, à Alger et qu'en aucun cas la fabrication ne peut en être confiée aux autorités basées au Sénégal... et pour la mise en eaux d'un tel bâtiment les agrandissements devraient permettre ensuite de mettre en service n'importe quel navire!

Messieurs, messieurs, un peu de calme s’il vous plaît… dans un moment furtif l’amiral croisa le regard du gamin… si possible… rajouta t-il. Paul je comprend très bien le problème des longues distances, nous l’avions déjà évoquer lors de notre précédent entretient. Mais je suis désolé, sur ce point les Forces Navales Françaises Libres ont tout de même fait d’énormes progrès. Je ne vous comprend plus, le trajet que vous aurez dès lors à effectué n’a plus rien de commun avec les risques énormes que vous deviez prendre auparavant… sans parler du temps qui se trouve être fortement réduit grâce à Alger et Rabat que nous venons à peine il y à quelques jours d’investir… nous sommes d’accord ? Quant à l’aviation, commandant Doria il me semble que vous êtes fort péremptoire dans vos affirmations qui sont pour le moins erroné, permettez moi de vous le faire remarquer.

Il y eu comme un moment de flottement qui dura quelques secondes qui parurent à Muselier être interminable…

De plus, si je vous remercie pour votre franchise, vous semblez tous deux oubliez un point très important dans cette affaire. A l’heure actuel, la France est occupé et ces industries travail sous la menace et mêmes parfois sous la torture pour le compte de l’Allemagne… seul les territoires d’outre-mer ainsi que les zones de la France Libres et ces industries pourvoient à nos besoins, mais elles ne peuvent y satisfaire seul. Ceci à la grande différence des Américains ou des Anglais auprès desquels, le Général et moi-même devons négocier jour après jour pour être approvisionné et veuillez croire que ce n’est pas une mince affaire. Aussi j’aimerais vous faire comprendre que si effectivement le Général à un vaste projet, comme vous dites Daucourt, il est tributaire des Alliés dont la coopération dépend fortement des événements et du cours de la guerre…

Soudain quelqu’un frappa à la porte… Entrez… une charmante secrétaire entra, le téléphone à la main, traînant derrière elle le cordon noir qui pouvait atteindre tous les endroits de l’étage… Excusez moi de vous déranger Amiral, mais vous avez une communication en droite ligne de Londres, monsieur.

Merci mademoiselle… Allo ?... Allo !... lui-même... Oui mon Général... Comment ?... vous en êtes sur mon Général… non non… oui… devant moi, oui mon Général…fit-il en regardant Daucourt… Bien mon Général… à vos ordres mon Général… j’attend vos instructions mon Général… Tout en raccrochant le cornet, l’Amiral avait l’air pensif… la nouvelle que venait de lui transmettre Londres sembla jeter le trouble dans ces pensées… Commandant Daucourt, avec votre permission je souhaiterais avoir accès à un bureau ici même… il semblerais que des événements inattendues se mettent en place…

L'affaire avait l'air des plus urgentes. Le repas presque fini les 2 hommes se levèrent et après s'être excusés auprès du reste des convives montèrent tous les deux à l'étage supérieur. Daucourt poussa une porte et pénétra dans la pièce.

C'est ici Amiral : https://dasboot.forumactif.com/communication-interne-a-la-flottille-f51/bureau-de-l-amiral-muselier-t2982.htm#58188

Erwan finissait ces ronds de fumée par dessus la table, toujours vautré sur sa chaise il n’avait même pas bouger quand Daucourt et Muselier s’étaient levé… en fait il ruminais les paroles du pacha… vouloir le mettre lui à la glande sur un traîne pattes de ravito… non mais il déconnais sec le pacha sur ce coup… il fut tiré de ces pensées par Paul…

C’est con, je commençais à m’habituer à ta tronche gueule d’ange… puis… euh qu’est ce que t’a dis la ?... avec Dédé… euh on parle bien du même Dédé ?... je veut dire, Jubelin ?... Erwan se leva se dirigeant vers la porte alors que Paul parcourait déjà le couloir…

Hey, gueule d’ange… il le rattrapa et le fixa droit dans les yeux… tu sais comment ça ce fait qu’elle était dans les bras de Jubelin ?... Paul haussa les épaules… ben dis donc, t’est encore plus con que je pensais alors… si tu l’aimais vraiment ma sœur, au lieu de la quitter t’essayerais de savoir ce qui c’est passé, t’essayerais comprendre… tu la laisserais pas tomber au premier coup dur… finalement, t’est comme tous les mecs…t’est bête, lâche et aveugle… tu la mérite pas ma petite sœur…les deux hommes se fixèrent du regard…

Dans le couloir la tension était palpable… les deux hommes soutenant chacun le regard de l’autre. Tout au long, du récit de Paul, le gamin n’avait pas bouger assimilant toute l’histoire… du moins l’histoire vu par Paul. Puis se dernier reprit sa route, laissant Erwan à ces pensées qui s’entrechoquais dans sa tête… Quelques secondes plus tard Erwan attrapa Paul par l’épaule qui se retourna et reçu un coup de poings dans la figure qui le projeta le cul par terre contre le mur… Paul releva la tête…

Ca c’est pour avoir bousculer Manon… fit Erwan, le doigt pointé sur Paul…

Et maintenant… primo… ma grande gueule elle t’emmerde… et si t’est pas content c’est le même prix…

Secundo, depuis le temps tu devrais savoir que Manon elle supporte pas l’alcool… un demi dé à coudre d’alcool et elle est pompette… d’ailleurs à son bord il n’y à pas d’alcool… je le sais, la dernière fois qu’elle ma repêcher on à bu de l’eau pendant cinq jours… Erwan fit une moue de dégoûts en y repensant… donc si elle était saoul c’est qu’on à apporter de l’alcool à bord, et si c’est ce que je pense et qu’il en à profiter… Erwan serra les poings qui devinrent rouge… Dédé est un homme mort… à cet instant le regard d’Erwan c’était fait plus noir que du charbon…

Et tertio… je suis peut-être pas toujours doué avec les filles et j’y connais peut-être pas grand-chose mais la façon dont Manon pose les yeux sur toi… ben c’est la première fois que je la vois comme ça… donc si tu préfère allez noyer tes sentiments au bistrot au lieu de prendre sur toi et de te coller un instant ta fierté au cul, tu vaut pas mieux que ce que tu critique… pauvre cloche…

Daucourt redescendait les escaliers afin de faire part aux personnel des ajustements à mettre en place pour l'aménagement du bureau de l'amiral Muselier quand il fut alerté par des éclats de voix venant du couloir.

Il tomba nez à nez sur Erwan et Paul se toisant du regard, un peu de sang coulait sous le nez de Paul. Il se campa devant les deux hommes qui ne s'étaient même pas aperçu de sa présence.

Une fois n'est pas coutume, Daucourt perdit son calme légendaire et du se retenir de crier afin de ne pas alerter l'Amiral à l'étage supérieur.

Non mais vous vous croyez où? On est pas dans un troquet ici! Paul et Erwan tournèrent le regard vers lui et furent surpris du ton employé.

Erwan vu le cirque que tu nous as fait tout à l'heure avec l'Amiral, je crois que tu devrais veiller à ne pas trop attirer l'attention. Quant à toi Paul ce n'est pas mieux, j'ai eu vent de ce qui s'était passé avec le commandant Jubelin. Il va faloir que la foire à empoigne cesse, sinon quoi, la prochaine fois vous allez vous allumer au 140mm dans la rade? Vraiment quel beau spectacle!

Plusieurs personnes se trouvaient maintenant dans le couloir ainsi que les deux agents de la police militaire qui étaient de faction à l'entrée.

Foutez-moi ces deux là au cachot jusqu'à demain matin, je ne veux plus en entendre parler d'ici là. Dit-il sans les lâcher du regard.

Et veillez-bien à les mettre dans la même cellule. Comme ça vous pourrez vous expliquer tant que vous voudrez sans provoquer le moindre dégât.

Sur ce il tourna les talons pour se rendre à l'intendance tandis que les deux agents de la PM s'approchaient des deux lascars pour les emmener. On l'entendit grommeler au loin. J'ai assez de choses à faire pour avoir encore à m'occuper de ce genre d'imbécilités...

Daucourt n'avait pas eu le temps de répondre à Paul et à vrai dire il avait d'autres chats à fouetter. L'un des deux agents s'élançait à sa suite de mais il n'eut pas le temps de passer la porte.

Stop! Laissez-le filer, une fois qu'il aura cuvé ça ira sûrement mieux.

Et celui-là qu'est-ce qu'on en fait? Demanda le deuxième en saisissant Erwan à l'épaule qui commença immédiatement à se débattre.

Qu'il disparaisse aussi où il veut mais je veux qu'ils arrêtent tout ce foin ici. dit-il avec un regard noir comme on lui en avait rarement vu.

Puis il repassa la porte laissant tout ce petit monde dans le couloir. Vraiment qu'il était pénible d'avoir à gérer ce genre de caractères, il fallait les renvoyer en mer au plus vite pour combattre. Si on était pas en temps de crise il les aurait volontier envoyés en cour martiale, mais c'est avec ce genre de fous furieux qu'on gagne une guerre...

C’est à présent devant le garde de la MP qu’Erwan était planté… un air de défi dans les yeux… me touche pas toi… ou je te fais remonter les groseilles au niveaux de tes amygdales… compris, tête d’œuf… le garde resta bouche bée un moment… alors que le gamin se dirigea vers les escaliers… ne faisant aucun effort pour ne pas bousculer Carles épaule contre épaule en passant il lâcha… s’allumer au 140mm dans la rade c’est peut-être pas une si mauvaise idée que ça… puis il monta au dernier étage dans les dortoirs.

Seul, il rassembla toutes ces affaires dans un grand sac de toile… il décrocha la photo en noire et blanc accrocher au dessus de son lit… caressant du doigt le visage photographique de sa petite sœur adorée… une larme perla sur sa joue.

Serrant la photo dans sa main il monta sur le toit et à travers de large lunette de soleil il contempla la hauteur qui le séparais du trottoir. Puis son regard glissa sur les toits blancs de la ville ou les femmes voilés de la tête a pieds étendaient leurs lignes et s’échangeaient les nouvelles fraîches du quartier…

Givré du bocal… maugréât-il…