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Savior Mc Patton
Vent calme
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Nationalité: Américain (Atlantique)/Commonwealth

Une partie de l'Histoire de Salvatore Patania Empty Une partie de l'Histoire de Salvatore Patania

Lun 03 Avr 2017, 00:53
Chapitre 1

Newark, Mars 1977.

Je suis arrivé au chevet du vieux Savior Mc Patton sur le coup de midi.
C'était plus que l'ombre de lui-même, ouais ça on pouvait le dire. Pas qu'il n’ait jamais été bien grand, le bonhomme. 
À le voir ainsi, le teint pâle et le visage émacié, j'en ai rangé mon flingue. Rien de plus qu'un dentier sur pattes le Salvatore.
Pour le sauver il n'y avait plus qu'à prier que Sainte Rita se bouge les miches ou que la médecine fasse soudainement un prodigieux bond en avant de mille ans.
Pauvre tas d'os informe, il était allongé sur un lit que plus personne ne songeait à changer et surtout pas moi. C'était à coup sûr son lit de mort.
Sur sa table de chevet, des lettres d'insultes et de menaces qui s'accumulaient. Dans son état, plus de quoi se soucier. 

Son fils, assis à ses cotés se grattait frénétiquement la joue et l'entre-jambe, en alternance. 
Apparemment pour l'hygiène c'était comme pour le courage et l'honneur, c'était pas trop ça dans la famille.


"Approche-toi fils, approche-toi j'y vois plus rien avec cette morphine...
Il... il faut que je te parle... je ne peux pas partir avec ces choses sur ma conscience... 
Approche-toi encore un peu...
...
*Burp*

*Scuse*
..."


Le vieux semblait avoir soudainement regagné en esprit et en superbe. On le sentait comme revigoré par cette bonne blague.
Connaissant l'animal, on allait en avoir de la confidence.



Chapitre 2

- Ouais gamin, écoute bien. 
Tu ne m'aimeras pas plus mais au moins tu comprendras peut-être certaines choses.
Avec le temps que t'as mis à me retrouver, tu mérites bien que j't'raconte.
Déjà tu sauras pourquoi qu'tu t'appelles Mac Patton et pas Patania.

Tu vois, pendant la guerre... c'était pas tout blanc ou tout noir.  
Il y avait les héros, ceux dont ils parlent aux actualités, avec les médailles et leurs auréoles de gloire. 
Y avait les gens qui se battaient mais qui savaient pas trop pourquoi, et ceux qui ne faisaient qu'obéir aux ordres mais qui ont parfois commis les pires des crimes.
Il y avait aussi les pourris, ceux qui aimaient vraiment ça la guerre, la mort.
Et puis il y avait moi, ton père.
J'en ai vu du crade, du pas beau, du sale.

Bref, on n'avait pas souvent l'occasion de rigoler.
Sauf sur la fin, quand ça sentait la saucisse aux choux Vaudoise pour le Duce, accro au jeu du foulard qu'il était ce con. Maintenant je peux le dire. 
J'étais aux commandes du Conforama à l'époque. Un putain de navire vu de l'extérieur, une vraie poubelle de l’intérieur. 
C'était tout du contre-plaqué, à peine mieux qu'un décor de la Cinecitta.
A l'époque on devait se rendre en Libye depuis Rome en passant au large de la Sicile. Cherche pas, y a pas de contrepèterie ici, gamin.
C'était l'occasion d'aller passer faire un coucou à mes vieux potes Pepe, Giaccomo, les frangins Rossi (Valentino et Tino) qui étaient au bar du vieux-port en train de se saouler copieusement.
J'avais donné l’ordre de s'approcher au plus près pour qu'on puisse les voir et leur crier des insultes bien senties.
Et ça a pas raté "Stronsso! Finocchio!!! Testa di Cazzo!!!" ahahahhaha ce qu'on a rigolé. T'aurais vu la tête de Tino!
Ce qu'on avait pas trop vu par contre c'était le récif, et le temps que je donne l'ordre de filer à Bâbord toute, le timonier qui était peintre avant guerre et qui avait déjà pas mal taquiné la Grappa s'est emmêlé les pinceaux et s'est mis à foncer plein pot. 

Autant dire qu'on a râpé et pas qu'un peu.
15 minutes plus tard on était couchés sur le côté, le Conforama éventré et l'amirauté qui beuglait à la radio.
Encore heureux que les torpilles n'aient pas explosé.

T'aurais fait quoi à ma place? Responsable du désastre, aller expliquer ça en court martiale?
Et bin je me suis barré, oui! et vite fait même! C'était pas le moment de traîner sur place!

N'empêche le Tino avec son goitre et sa vieille face de furoncle, il m'a bien sorti de la mouscaille en me planquant dans sa grange, quand les Carabiniers sont arrivés. 
Pour le coup on rigolait moins. 
Ça a duré des jours. Le soir il me donnait des nouvelles:
Toute l'Italie me cherchait! J'étais la honte du pays, le pire pourri de l'histoire de la marine italienne! 
Pense-donc! Conduite d'un navire sous l'emprise d'un état alcoolique! 12 points en moins direct! Annulation du permis de barboter! Avec en plus Abandon de poste! l'Infâme! Le Déserteur! Le pourri suprême!
Ma poire en pleine page du "Corriere" et de la "Stampa", la Honte de la Nation... 
Le Duce lui-même avait juré de me retrouver et de m'étriper en place publique.

C'est encore Tino qui m'a fait passer de nuit dans le Cargo en partance pour l'Algérie, avec les bestiaux.
Une fois là-bas c'est grâce à un de ses contacts que j'ai embarqué en clando dans les soutes de cet autre cargo, américain ce coup-ci et bourré de came.  
Y en avait d'autres, des comme moi, avec femmes en enfants qui fuyaient la misère et la guerre.
Seulement voilà on s'est fait torpiller. Les allemands peut-être, je n'ai jamais su.
Des canots de sauvetages il n'y en avait que 2, fallait bien faire de la place!
C'était pas joli-joli je te le concède. Mais on était bientot en vue des côtes et j'avais déjà sacrément envie de les voir, ces danseuses de claquettes!

C'est à Chicago qu'on a débarqué, moi et le deuxième canot plein de came. 
Gratte-ciels, néons, tout le toutim. 
La came c'était mon cadeau d'acceuil pour Johnny Stracciatella. 
Son surnom venait des petits éclats de chocolats qu'il avait reçus dans la poire (melba) pendant la première guerre, ou de son gout pour la pipe à la vanille, je ne sais plus.

Ah j'en ai fait des coups tordus pour ce vieux pourri! Quand il fallait nettoyer, racketter ou expulser la veuve et l'orphelin il savait que je ne disais jamais non.
Pas joli-joli hein? Ouais, mais il fallait bien vivre! et encore je te passe les détails. Trop long à te raconter. En tous cas il payait bien.

Quand il a été dessoudé en pleine rue je me suis retrouvé sans emploi, mais avec assez de sous de coté pour reprendre une petite affaire, un bordel dans la 87ème Est. 
C'est là que j'ai rencontré ta mère d'ailleurs.
Quand elle m'a annoncé qu'elle était enceinte et qu'en plus elle faisait de l’eczéma, ça m'a fait comme un flashback: je pouvais pas rester là.
Et bin oui je me suis barré, et vite-fait même! 

Et pour disparaître, l'armée y a pas mieux. Ils sont pas regardants quand il s'agit d'aller se faire trouer la peau, hein! Les vaches!
Il fallait juste donner un nom, j'en ai donné un bien américain. Pas trop loin de mon vrai, je voulais pas trop trahir mes ancêtres pour une fois.
Donc j'étais enrôlé et j'ai pris la mer.

La tienne, de mère? j'ai jamais vraiment su. Il paraît qu'on la retrouvée un matin à moitié bouffée par des chiens. Je lui avais pourtant bien dit qu'à force de se gratter les croûtes ça allait attirer les bêtes.

Enfin voilà, tu sais tout.
Maintenant tu sais qu'en plus d'être un enfant de putain t'es aussi un fils de salaud. 
Tu sais aussi pourquoi t'as cette drôle de gueule et cette vilaine peau.

Quoi, tu pleures que t'as passé des années à me chercher juste pour entendre ça avant que je crève?

Bin ouais désolé gamin, mais il fallait que le dise, sinon je l'aurais eu sur la conscience.

Puis t'as pas eu besoin de moi pendant tout ce temps, alors hein? Bin alors!

Donc ça change rien, mais moi au moins je peux crever peinard maintenant.

Allez, Ciao."


Un petit "Hic" et puis soudainement, il était à nouveau le cadavre blafard que j'avais vu l'instant d'avant.

Il ne respirait à peine plus et ses traits s'étaient détendus, il souriait presque. 

Il souriait même carrément, cette vieille enflure!

Puis il a eu comme un dernier hoquet accompagné par une longue flatulence en Fa dièse. 
Les derniers relents de ce qui avait été sa vie.

Une belle vie de salaud.

Son fils pleurait.

J'ai ouvert la fenêtre, et je suis sorti.
Pauvre gamin.
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