Rencontre au sommet

Le cuirassé Italien Roma était enfin revenu à quai. Déja des centaines d'hommes s'affairaient à ses réparations et à son ravitaillement. Augusto avait à ce propos donné toutes ces directives bien avant l'arrivée à quai du mastodonte et en avait profité pour éplucher les rapports de plus en plus nombreux qu'il recevait chaque jour.

Il était resté la plupart du temps à son bureau depuis l'attaque la destruction complète du cuirassé King Georges V qui mouillait dans la rade du port d'Oran. Et c'est un homme avec les traits tirés que les marins purent apercevoir lors du dernier rassemblement sur le pont du Roma précédant le débarquement.

Effectivement cela faisait deux bons mois que le Roma n'était plus rentré au bercail. Nombre de missions à travers toute la méditérannée même toutes courronnées de succès avaient fini par user le commandant, le navire mais également l'équipage qui acceuillait avec bonheur la persmission qui lui était accordée.

Dès que la cérémonie fut finie Augusto pris la direction de la rampe d'accès du navire et la descendit suivit de près par son aide de camp. Ce dernier peinait à suivre son commandant tant il était chargé de dossiers, rapports et autre paperasse. Tous deux s'engoufrirent dans la Lancia Aprilia Coloniale qui les attendait en bas. En effet le commandant de la Xa-MAS avait demandé de toute urgence une rencontre avec l'amiral Italien Angelo Iachino. Les nouvelles qu'il avait au jour le jour depuis quelque temps étaient extrêmement inquiètantes. Des informations radio faisaient état d'une très forte concentration alliée en méditérannée orientale et le listing établit par les services de renseignements de la Regia Marina se devait d'être confirmés par ceux des services secrets Italiens.

Si cela se confirmait les temps allaient s'annoncer très durs pour la Regia Marina. Après une petite demi-heure de route, Augusto arriva en vue des batîments de l'amirauté. Son aide de camp lui donna les dossiers alors qu'il filait vers la réception pour faire valoir son entretien auprès de l'amiral. La réceptioniste était au courant de son arrivée et elle invita directement Augusto à la suivre jusqu'au bureau de l'amiral. C'était bien une des premières fois ou Augusto n'eu pas à attendre dans le salon prévu à cet effet avant d'avoir droit à son entretien avec l'amiral. Quelque part cela l'arrangeait la situation était critique et d'autre part il ne pouvait s'empêcher de penser que l'amiral était déja au courant du but de sa visite et des enjeux que cela sous-entendait.

Poussant les lourds battants de la porte en chêne du bureau, la réceptioniste prit congé d'Augusto et le laissa entrer dans l'immense bureau. Déja l'amiral se dirigeait vers Augusto et lui serra la main de manière franche. Cela pouvait paraitre bizarre mais cela faisait longtemps que les 2 hommes ne se saluaient plus de manière militaire et officielle.

L'amiral prit rapidement la parole après savoir invité Augusto à s'assoir et avoir fait de même:

" Alors commandant Migliorini, comment allez vous, vous et vos hommes ? Nous avons bien reçu tous vos rapports et les exploits de la Xa-MAS sont maintenant connus par tous en Italie et en Allemagne. D'ailleurs à ce propos malheureusement et c'est la rançon de la gloire je n'ai pas pu empêcher le bureau de propagande de s'intéresser de plus près à vous. Il faudra vous soumettre à quelques vidéos/photos. Je sais que ce n'est jamais une partie de plaisir pour des gens de terrain comme nous mais malheureusement l'argent est le nerf de la guerre et si cela peut aider à renforcer l'effort de guerre ce n'est pas à négliger. Mais bon si vous avez demandé à me voir c'est que vous avez des choses urgentes à me dire je suppose ? "

Augusto prit la parole après avoir prit une grande inspiration. En effet, il avait beaucoup de choses à expliquer à l'amiral:

" Et bien Amiral la situation j'en ai bien peur risque de devenir critique en méditérannée sous peu. J'ai reçu depuis quelques semaines de très nombreux rapports qui ont confirmés mes soupçons. Il semblerait qu'une coalition alliée ait passé le canal de Suez et soit à l'heure actuelle en train de faire route vers l'Italie. D'après nos rapports aériens, radio et nos indictateurs sur place, pas moins de 7 flottilles alliées dont 1 spécialement dépéchée sur le front pacifique font route vers Malte. Nous pensons que leur objectif principal est de ravitailler l'île que nous avons précédemment mise à mal afin d'en refaire une base digne de ce nom et capable de servir à nouveau pour lancer des opérations alliées en méditérannée. De plus nous savons de source sûre que 2 flottilles américaines se rassemblent pour passer le détroit de Gibraltar également.

Nous avons établi un listing approximatif certes mais assez exhaustif pour le moment des forces alliées en présence. Il évolue au jour le jour donc veuillez considérer ces informations d'ore et déja obsolètes. La force alliée coalisée comporte les 7 flottilles suivantes: F.A.N.A. - Carcharodon, F.A.N.A. - Leviathan, Flotte de la Mer Noire, Force K, A.F Task Force 1, A.F Task Force 2 et la Force A. En terme de navires et de puissance de feu, cela représente pas moins de 14 destroyers, 6 croiseurs légers, 2 croiseurs lourds, 5 cuirassés ainsi que quelques divers petits navires de soutien mais également un nombre indéterminé de sous-marins. Et encore, les chiffres que je vous avance là sont déja obsolètes comme je vous le disait précédemment.

Je voulais également attirer votre attention sur le fait que la Regia Marina à elle seule ne pourrait probablement pas empêcher cette flotte de remettre en opération la base anglaise de Malte. C'est pourquoi je suis venu ici vous demander votre soutien. J'ai prit la peine de rédiger un rapport qui a été lu et approuvé par mes collègues hiérarchiques et que je me permet de vous transmettre. Il contient les demandes de soutien à la Regia Marina et les idées que nous avons pour tenter d'endiguer cette attaque alliée massive."

Tendant le dossier Augusto reprit son souffle et attendit la réaction de l'amiral qui contre toute attente esquissa un sourire et lui répondit:

" Nous sommes également au courant depuis un bon moment maintenant des mouvements des alliés grâce aux services de renseignements de l'Axe. Il fallait bien qu'un jour les alliés se réveillent et prennent à bras le corps leurs soucis en méditérannée. Heureusement leur absence nous a permis de frapper très fort et de très nombreuses fois et leur venue en méditérannée permet maintenant à nos alliés Allemands de reprendre le controle de l'Atlantique. Nous avons d'ailleurs appris que la flotte lourde Russe du Nord a été totalement détruite par la Kriegsmarine il y a peu. Les nouvelles ne sont donc pas toutes désastreuses loin de là. De plus sachant cela nous ne vous avons pas attendu pour nous préparer à subir des temps très durs mais je vais tenir compte de vos recommandations et demandes concernant l'attitude à adopter face à cette flotte enemie. Néanmoins je vous demanderais d'être patient car ce sont des décisions que je ne peux prendre seul et je dois en aviser le Duce également."

Prenant le dossier que lui tendait Augusto, l'amiral le raccompagna jusqu'à la porte de son bureau et les 2 hommes prirent congé l'un de l'autre.

Pendant ce temps, dans la campagne italienne...

Train d'atterrissage sorti, le Messerschmitt 109-G s’aligna avec la piste. Les roues caressèrent avec douceur le bitume sicilien.
L’avion s’arrêta bientôt. Panne sèche.
Les mécaniciens de la base se précipitèrent alors et libérèrent la piste. Le camion-citerne s’avançait déjà.
Le pilote descendit, grimaça, pris la canne qu’on lui tendait…



Décidément Hans-Joachim Marseille trouvait qu’il s’était amolli. Neuf mois d’hôpital et de rééducation étaient passés par là.
Après l’avarie moteur qui avait failli lui être fatale, l’as allemand crédité 151 victoires, s’en était tiré par miracle malgré ses multiples fractures, ses brûlures.
Malgré tout, il était mécontent. Seulement 8 victoires en deux mois. Contrairement à ce que la propagande fasciste annoncait, il n'était plus l'Etoile d'Afrique.
Il faut dire que jusqu’à maintenant, il n’avait fait que des missions d’escorte au-dessus de Malte ou des interceptions (souvent manquées d’ailleurs) de quadrimoteurs américains au-dessus de l’Italie.



En trombe, un Sparviero dernier modèle, dépassa l’aérodrome puis entama sa descente.
Le bombardier torpilleur trimoteur se posa en titubant sur une piste parallèle.
Une fois arrêté, Hans-Joachim admira ses formes. Il remarqua qu’il semblait flambant neuf bien qu’il portât déjà sa charge mortelle de torpille.

Il savait ce que cela signifiait : l’escadre allié n’était plus très loin. Les renforts aériens de l’Axe étaient tous mis à disposition de son attaque.
Mais qui disait armada disait couverture aérienne. Même si les rapports ne signalaient pas de porte-avion parmi les navires, il était fort à parier que les chasseurs anglais veilleraient.
Il avait hâte d’y être…

Oui, Hans-Joachim Marseille souriait !

La nuit suivante, à bord du Risorto, destroyer de la XIIIa MAS :

Un doux ronronnement maintenait l’aspirant Pubbliciano dans un état second. Là il oubliait le bruit et surtout l’odeur de cette satané salle des machines.
Un ordre le tira de ses rêves.
Encore un changement d’allure ! S’il voulait la mort de ses chaudières, il ne se serait pas pris autrement. Il avait pourtant prévenu le capitaine Terloni d’éviter des changements de régime trop brusques. En vain.
Toutes ses acrobaties pour un unique sous-marin français !

L’aspirant régla le brûleur et l’arrivée de carburant des chaudières sur un nouveau régime.
Le ronflement augmenta bientôt.
L’un des deux arbres vibra. L’aspirant Pubbliciano rajouta un bonne dose de l’huile sur celui-ci. Les vibrations diminuèrent et cessèrent alors.
Le mécanicien se servit un café. Il avait le goût de mazout, comme tout ici d’ailleurs. A force, on s’y faisait.



Peu avant la fin de son quart, une estafette vint trouver l’aspirant.
- Signore, il capitano mi commanda di dirle che deve prepare i motori per l’andatura massima.
- Monsieur, le capitaine m’envoie vous dire de préparer vos moteurs à l’allure maximum.
L’aspirant émit un grognement au mot « moteur » . C’était une turbine alimentée en vapeur et non pas un vulgaire moteur à piston !
- Bisognerà creare un annebbiamento quando sarà necessario
- Il faudra aussi générer un écran de fumée au même moment
continua l’estafette.

L’homme laissa l’aspirant Pubbliciano à sa salle des machines, la tête pleine de questions.
Etions-nous en plein combat ?
Non, le navire ne virait pas sans arrêt et les canons n’aboyaient pas.
Alors pourquoi cette manœuvre réservée aux situations critiques ?
Bien sûr : un mouvement camouflé ! L’escadre ennemie dont on avait tant parlé lors de l’escale à Tobruk, il y a quelques jours serait-elle déjà signalée ?

Puis vint l’ordre d’exécution de la manœuvre.
Les arbres tournaient à leur vitesse maximum que leur donnait leurs 650.000 chevaux.
Les différents destroyers et torpilleurs, disposés en ligne émettaient de lourds nuages noirs malodorants tandis que leurs étraves fendaient l’écume…

L'amiral Italien venait de terminer sa lettre. D'un geste vif de la main il l'a signa élégament puis la donna à sa secrétaire qui s'empressa de la mettre dans une enveloppe scéllée et cachetée prioritaire à l'intention des chefs de flottille Italiens.

Commandants, suite aux dossier que vous avez transmis à l'amirauté ainsi que les demandes et propositions qu'il contenait, l'amirauté Italienne et le Duce se sont penchés sur la question. Nous pouvons d'ore et déja vous rassurer en ce qui concerne la défense des ports de l'Axe en méditérannée. Ces ports sont bien protégés que cela soit par des batteries côtières ou des batteries anti-aériennes. De ce fait nous sommes en mesure de vous garantir une sécurité sans failles pour tous les navires qui auraient à y faire escalle et à y jeter l'ancre.

Néanmoins l'amirauté se voit contrainte de décliner votre seconde demande faute de moyens. En effet, les combats sont en ce moment très durs en Afrique du Nord et tous nos effectifs y sont situés. De ce fait il est impossible de les mobiliser sur d'autres fronts.

Bien à vous,

Amiral Iachino